Fi donc de la querelle de clocher opposant Montréal à Toronto (ou Montréal à Québec ou Montréal et le reste du monde,) me voilà donc accueillie à Toronto, la plus grande ville du Canada, par une tempête de neige et une température de - 8°.
Arrivée pour le moins chaotique sur le territoire anglophone ; non seulement quatre heures de plus que prévu pour rejoindre l'aéroport de Toronto, mais plus d'une demie heure a été nécessaire à Air Canada pour trouver un escalier nous permettant de quitter l'avion ! (Ha, si seulement j'avais pu voir la fin de "Bienvenue chez les ch'tits" ... troublantes similitudes avec le joual des québécois ... ).
Démonstration d'émotions toute bretonne, les retrouvailles furent chaleureusement célébrées par une bataille de boules de neige en règle et un superbe bonhomme à l'entrée du Marriott Downtown. Chance fabuleuse d'être au cœur même de l'action. (toisée du dix septième étage !)
Parée pour les grands froids et n'offrant au vent qu'un bout de nez rouge, un café à la main (je comprends enfin le réconfort d'un liquide brûlant, excellent compagnon de promenade givrée), la démarche mal assurée (sur les trottoirs pourtant déblayés) et encouragée par un beau ciel bleu, je découvre avec bonheur la proximité de mes objectifs touristiques. L'AGO, musée des Beaux Arts (que Maya, en voyage d'affaires n'aura malheureusement pas le temps de visiter) n'est qu'à quelques blocs, il me suffit donc maintenant de traverser Chinatown pour me rendre Kensington Market.
Le quartier chinois de Toronto, (l'un des plus importants du Canada) est clairement annoncé ; tranchant avec les buildings du quartier d'affaire, les idéogrammes des enseignes offrant des massages de pied à 25 $ se répètent, les restaurants bien sûr, mais aussi les vidéo club, le plus troublant étant les étals de fruits, de crevettes séchées (?) et les canards pendouillants en vitrine derrière des chinois affairés à déblayer leur bout de trottoir à grands coups de pelle à neige ...
Le marché de Kensington se réveille aussi avec la même gymnastique. Tout aussi charmants que mes joyeux québécois, les torontois patientent gentiment pour me laisser photographier. Après le ballet des "tracteurs déblayeurs" aperçus dans la nuit (grâce à ce magnifique retard), ces gestes clairements routiniers que je suis seule à regarder rendent terriblement concret mon hiver québécois à venir ... Mais avec le soleil de mon côté, rien ne saurait gâcher mon exploration d'un quartier au goût d'Earl Grey, soupirant d'aise (en regrettant mes lunettes de soleil) à la terrasse d'un café (encore !) devant une architecture qui (enfin !) me sourit et me parle !
De petites maisons colorées aux jardins charmants, des puces aérées et mélangées à des poissonneries, des boucheries, bref toute sorte de commerces et - élément important - le "marché", qui s'étend tout de même sur plusieurs rues, est accessible via un autre quartier vivant, lui même relié à un autre quartier ... Quelques usines fument par ci par là mais se mélangent au paysage, les fils électriques barrant le ciel sont aussi nombreux qu'à Montréal mais au moins certains sont pour le joli tramway rouge ... Est il bien utile de comparer une ville à une autre ? Suis je simplement grisée par mon statut officiel de touriste ? Cette réflexion, menée au carrefour de Dundas street et St Patrick, fut stoppée nette par une boule de neige m'explosant en pleine figure. (Je ne saurais jamais si les flocons me dégoulinants dans le cou étaient dûs au réchauffement de la neige du toit de l'abri bus voisin, d'un malicieux torontois ou de cette pensée peu profonde)
Le lendemain, réfugiée bien au chaud une bonne partie de la journée à l'AGO, ravie de jouer avec de vieux appareils de stéréoscopie (la photo en stéréo !), perplexe par moment devant les étages d'Art contemporain, étonnée du peu d'œuvres autochtones à l'étage "canadien" mais bluffée par le nombre de représentations de la forêt et de la mythique cabane au fond des bois, comme si le plaisir de retrouver une compatriote et amie de jasette ne suffisait pas, le musée a aussi organisé une impressionnante exposition européenne.
"17th-century Dutch and Flemish painting, 17th-century Italian baroque works, 19th-century French impressionism, 20th-century surrealism ..." as they say !
Formidable et étonnant moment en traversant les salles, sentiment de familiarité, de retrouvailles.
En fin d'après midi, le taxi pour l'aéroport réservé, Thomas, confrère inspiré de Maya, nous donne rendez vous pour boire un verre. Tout d'abord frustrée de partager ces derniers moments avec un inconnu "des assurances", c'est finalement bouches bées et collées à la vitre du bar du Canoé, un verre de Chardonnay à la main que nous assistons au coucher du soleil, perchées non seulement sur nos tabourets mais au 51ème étage d'une tour voisine de la prestigieuse CN Tower (la plus grande tour du monde avec ses 553,33 m. toujours dans mon champs de vision durant mon séjour). Découverte inespérée, compte tenu du peu de temps restant, la ville s'éclaire peu à peu à nos pieds et devant nous, le lac Ontario (une mer !), les îles... Le retour à l'hôtel intitulé "remontée des saumons" à cause du flux des businessmen descendant tous d'un même pas décidé vers le métro, fut absolument euphorique. Ravies, nous nous séparons "just in time" dans les couloirs de l'aéroport, destination Munich et Montréal ; d'ar gêr ! *
* à la maison !
PS : les photos : http://www.facebook.com/album.php?aid=41108&l=626a0&id=651317263